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[Responsabilité] [Produits défectueux] [Défaut d’information] [Notice] [Médicaments]

23 avr. 2023

Un patient présentant une fibrillation auriculaire a été traité pendant plusieurs mois avec de l’Amiadarone, principe actif de la Cordarone, médicament utilisé dans la prévention et le traitement des troubles du rythme cardiaque. Il a alors développé une hypoxie sévère et une pneumopathie interstitielle diffuse, avant de décéder après l’apparition d’une fibrose pulmonaire.


Après avoir obtenu une expertise médicale et appelé en intervention forcée l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), les ayants-droits du défunt ont agi en justice contre le laboratoire commercialisant le médicament, sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux, ainsi que le médecin cardiologue prescripteur du traitement, au titre de fautes dans la prise en charge du patient.


Par arrêt du 25 novembre 2021, après avoir rappelé que le caractère défectueux du produit peut consister en une information insuffisante sur les conditions de l’utilisation du produit, les indications ou les risques encourus par l’utilisateur du produit et peut être apprécié en considérant le rapport bénéfice / risque du produit, évalué au regard de la gravité des effets nocifs constatés et la fréquence de leur survenue, la Cour d’appel avait :

 

  • jugé que l’information fournie dans la notice du médicament était insuffisante et ne satisfaisait pas à l’exigence de sécurité des produits de santé en ce qu’il n’y était pas fait mention du risque de survenue d’une pneumopathie pouvant évoluer en fibrose pulmonaire mais, seulement de « problèmes respiratoires (essoufflement, fièvre, toux)  » et que ce défaut d’information est assimilable à un défaut du produit engageant la responsabilité du fabricant,


  • jugé que le médecin prescripteur avait manqué à son devoir d’information, à l’origine d’un préjudice moral résultant d’un défaut de préparation aux conséquences du risque et d’une perte de chance de chance d’éviter la réalisation du risque provoqué par un manquement du médecin à son devoir d’information, le condamnant ainsi in solidum avec le laboratoire producteur de la spécialité à l’indemnisation des préjudices du patient.


Le laboratoire ayant formé un pourvoi contre cet arrêt, la première chambre civile de la Cour de cassation a, dans un arrêt du 29 mars 2023, a rejeté le pourvoi, en toutes ses branches, et confirmé l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles.

 

Pour ce faire, la Cour de cassation a rappelé que :

 

  • aux termes de l'article 1386-4, alinéas 1er et 2, devenu 1245-3, alinéas 1er et 2, du Code civil, un produit est défectueux lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre et dans l'appréciation de celle-ci, il doit être tenu compte de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, de l'usage qui peut en être raisonnablement attendu et du moment de sa mise en circulation,


  • la cour d'appel a relevé que, si le résumé des caractéristiques du produit (RCP) et le Vidal, à destination des professionnels de santé, concernant l'Amiodarone, mentionnaient au chapitre des effets indésirables et au titre des manifestations pulmonaires des cas de pneumopathies interstitielles et alvéolaires diffuses et de broncholite oblitérante organisée pouvant évoluer en fibrose pulmonaire, la notice du médicament n'en faisait pas état mais mentionnait seulement des « problèmes respiratoires (essoufflement, fièvre, toux). »,


  • abstraction faite du motif surabondant tenant à la modification ultérieure de la notice de l'Amiodarone, la cour d'appel a pu en déduire que cette information était insuffisante et que ce médicament n'offrait pas la sécurité à laquelle on pouvait légitimement s'attendre et était dès lors défectueux.


Note


Cass. 1ère civ., 29 mars 2023, n°22-11.039

Auteurs:

Maud Chamoux - Associée

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